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Essai du Toyota Previa 2.4i 2005 - Mission
Type : Monovolume de déménagement
Puissance maxi à 00 tr/min
Couple maxi : 00 Nm dès 00 tr/min
Poids : 00 kg
Autonomie : 00 litres = 00 km
Puissance/Poids : 00 kW/t






 

 


Un coup de fil nocturne m'informe de ma prochaine mission : une extraction en urgence de biens et d'un civil afin de prévenir les effets néfastes d’un risque d'effondrement d'immeuble.  Ça promet ! 

Contact !  Paris, troisième arrondissement, le neuf décembre à vingt heures. Cette fois, on ne me prend pas pour un Charlot.  Il va falloir m'organiser en conséquence : cinq cents kilos avec un colis de cent septante-cinq centimètres sur soixante de largeur et trente de profondeur qui ne peut voyager que couché : fragilité impose !  La livraison se fera le lendemain avant vingt et une heures au quatrième étage sans ascenseur à Zurich.  La mission se terminera cent vingt kilomètres plus loin à vingt-deux heures.  Ouch !  Pour le reste, l'improvisation sera, comme toujours, la meilleure des solutions...

L'habituel Transall
Je coordonne de mon côté la logistique nécessaire, à la mode tactique.  Mille quatre cents kilomètres à faire avec un volume qui ne tient pas dans le paquetage.  Je me rabats sur un moyen de transport réquisitionné : un Toyota Previa essence, 2.4i, de 2005, ayant déjà soixante-huit mille kilomètres.  Il est plus petit que l'habituel Transall.  Le véhicule est disponible dès treize heures ce neuf décembre.  Vu la météo, le trajet risque d'être sportif !  Pas grave !   On s'adaptera...  Mettons la soute en configuration en évacuant le superflu, c’est-à-dire deux sièges qui passent facilement d'un geste par les portes latérales coulissantes, cela en deux coups de cuillères à pot.  Les pleins sont faits.  Il ne reste plus qu'à préparer la troupe.  Pour une fois on voyagera léger, sport élégant, la cravate verte soigneusement à sa place.  Ça change...
Rapide prise en main de l'engin en territoire ami, histoire de se familiariser un tantinet avec le gabarit, ma foi, costaud ; le nez est difficile à estimer, l'empennage lointain dans le dos et les ailes électriques en augmentent encore l'envergure.  Toujours mieux, d'autant que l'accès à la destination se fait par un passage d’un mètre quatre-vingt-sept de large, à la perpendiculaire dans une ruelle.  Ça doit passer, tolérance de cinq centimètres comprise. 

GPS portatif
Les commandes du poste de pilotage sont simples, robustes et disposées de manière assez claire.  Leur maniement en est relativement aisé et ça paraît solide, presque militaire !  La boîte à cinq vitesses manuelles est fidèle à la marque : légère, ça gratte un brin.  Le palonnier de gauche ne ressemble à rien de précis, celui de droite se révèle étonnement plus ferme.  Allez comprendre !  Pour les freins, je verrai à l'usage, mais vu le timing, moins je les utiliserai et plus je serai à l'heure.
L'assise me semble plus confortable que les banquettes de certaines soutes volantes et il y même un accoudoir !  La position de pilotage longue distance est vite découverte et pour l'occasion un GPS portatif trouve judicieusement sa place dans des rangements supérieurs, à gauche des cadrans.  Forcément à gauche, vu que les cadrans sont au centre et que la dimension de l'écran dudit GPS ne permettrait pas à mon oeil de tireur d'élite d'en distinguer le contenu s'il était à droite, tant la droite est lointaine...

Zodiac sur le Gange...
Le décollage s'effectue comme prévu à quatorze heures, la frontière est avalée incognito à quinze heures vingt et le périple commence.  Tout de suite la météo me fait comprendre que ce ne sera pas de tout repos.  Additionnant un amortissement assez souple même à vide, entre deux cisaillements de vent, j'ai parfois aussi l'impression d'être englouti dans un trou d'air.  Les quatre cents premiers kilomètres sont constitués de routes nationales et de villages isolés, dans lesquels des collègues en bleus regardent le trafic à la jumelle...  Vive le régulateur de vitesse et le GPS prévenant tout excès.  Salut amical de rigueur avec un sourire en coin et l'autoroute s'amorce pour les deux cents derniers plots, dans la nuit et le reste.
Quel reste !  Les bourrasques sont telles qu'à cent trente kilomètres à l’heure j'ai l'impression d'en faire deux cent cinquante et ce n'est pas la désagréable vibration des essuie-glaces qui me contredira.  Un bonheur ne venant jamais seul, j'ai une redoutable sensation de faire du Zodiac sur le Gange.  Les pneus neige neufs évacuent sans soucis la pluie, pendant que le vent se charge de faire osciller de manière bien visible l'évaporation du distillat de pétrole : à chaque rafale, c'est un demi litre de plus de l'autre précieux liquide qui s'évapore, dixit l'indicateur de consommation instantanée.  Dans tout ça, un fluide nommé sueur se sublime aussi de chez moi, tant il faut lutter, rectifier et anticiper la trajectoire.  Le fuselage est tellement imposant que je prends parfois un mètre d'écart qui exige les cent cinquante mètres suivants pour le corriger alors que les véhicules qui me dépassent (ça ce n'est pas raisonnable) filent droit.  J'ai beau tout tenter, relâcher un peu le manche et laisser faire ou au contraire tenir le truc, rien n'y fait.  Je n'ose pas imaginer l'impression sur les routes côtières par gros temps.

APRR
Un premier ravitaillement, histoire de me ressortir du bourbier de la circulation parisienne sans flipper sur la jauge, confirme que le liquide est plus onéreux encore ici que là-bas.  Le pied aussi léger que le budget octroyé, je repars dans la bagarre pour mieux plonger, discrètement, au coeur de la Ville lumière.  Le contact s'établit à vingt heures et une demi-heure plus tard, le cargo est posé dans la cour, après une courte lutte millimétrique avec la porte d'entrée et la Clio mal garée d'en face.  Vive le radar de recul que je me suis empressé de reconnecter.  Ses bips-bips incessants entre les plots des péages me l’avaient fait déconnecter…  À quand une vignette s’il vous plaît, c'est trop cher vos APRR (Autoroutes Paris Rhin Rhône) !
Le colis est là, avec quelques gardes et beaucoup de paquetages.  Le chargement s'effectue jusqu'à une heure du matin et après l'effort, le réconfort.  Le casernement est retrouvé, la couche vite préparée et un dodo de quatre heures est en vue.  À la diane(*), debout dès six heures, je prends le temps de contempler l'étendue des dégâts au bâtiment : je viens de passer la nuit dans un machin lézardé de partout, où le salpêtre n'a aucune pitié pour son hôpital et où l'humidité et certaines bestioles suffisent à vous rappeler une lointaine Guyane.
Le troisième régiment des officiels est attendu pour huit heures trente et le chargement du plus lourd est préparé, puis chargé dans un cargo local un peu plus gros que le Previa.  Les contraintes douanières pour les dents d'ivoire d'un illustre Steinway imposent de jouer la sécurité par un convoi séparé, qui n'a pas les mêmes contraintes d'horaire et de lieu.  Tranquille quoi ! 

666...
Repli stratégique du commandement sur un coin de table pour la paperasserie, au cas où…  Et je m'arrache avec le colis à onze heures.  La Clio mal garée ne l'est plus et c'est en moins de trois minutes que je sors mon gros bébé de son hôtel particulier, sous l’œil amusé de quelques bobos en pleine conquête de ce qui fût, il y a moins d'un an, un quartier populaire encore intact.  Tout change, accroche-toi !
À côté de la Bastille, le GPS rend l'âme.  La fenêtre CE se gaufre et j'en reviens à mes habitudes de pisteur, l'instinct aux aguets (surtout sur les arrières), la truffe attentive aux odeurs suspectes (il y en a et ce n'est pas que de la pomme) et le regard désabusé sur le flot de caisseux qui regardent passer les bus, métros et autres trains.  Une jungle en remplace une autre, la déclinaison magnétique et la végétation en moins...
Sans les trois touches magiques d'un bête clavier, c'est un petit bouton planqué et marqué Reset qui sauve la vie à mon bidule satellitaire : l’écran n'était pas loin...  Satan s'annonce avec le kilométrage restant jusqu'au point de remise : 666.  C'est comique, hein ?

Il faut du muscle...
Je rejoins, cent bornes après Paris, la zone de turbulences et cette fois, c'est dans l'arrière-train que je ressens, comme des coups de boutoir, les assauts d'Éole.  Chargée, la suspension est encore plus souple et à la correction de trajectoire horizontale s'ajoute la désagréable sensation de rebondir encore et encore sur le dernier cassis : direction Lyon.  Le rugissement du vent à l'étape ravitaillement est assez impressionnant et la prise aux rafales des portières est importante : les biscoteaux sont de sortie pour retenir les ouvrants.  C'est mieux les portes latérales coulissantes des 1007 !
Le ticket de péage entre les dents pour ne pas le perdre, je regagne le cockpit pour constater que la buée sur les vitrages met du temps à s'évacuer.  C'est humide, certes, mais bon, un petit coup de clim devrait suffire.  C'est vrai que le volume de la soute est important, mais c'est là que l'humidité se dissipe le mieux.  Je garderai un bandeau opaque en haut du pare-brise tout au long du retour...  que l'action de la ventilation soit laissée aux bons soins de l'automatisme ou du manuel que je suis.

Largage
Poussé par les bourrasques, plongé dans l'eau, humide et rebondissant, le TransPréviall aidé par la portance des rétroviseurs voit son ingurgitation stable malgré le chargement.  Par contre, à chaque côte, mon regard se détourne pudiquement de l'indicateur de consommation, histoire de vérifier ma carte de crédit et son solde disponible.  Je taperai en instantané les vingt-deux litres aux cent, vitesse stabilisée dans un légère montée...  Faut bien remplir le volume des quatre soutes en aluminium, à gosier variable, qui sont devant, non ?  Et j'arriverai même à patiner en passant de cent dix à cent trente, tant le museau est délesté par une charge qui reste dans la limite homologuée.  L'ancienne version du Prévia n'était-elle pas une propulsion : CQFD.
La sono à fond, fenêtre ouverte avec un grand sourire goguenard, une pastille sésame à képi perdue en bas à gauche du pare-brise immense (les initiés comprendront), je passe au culot sans sourciller et sans dédouaner ma précieuse cargaison.  Toujours dans une pluie battante, je file vers mon point de largage et l'anticipation du trafic autour de la City CH me permet d'arriver à l'heure.  Les volées de marches sont avalées au pas de charge, les bras remplis et la chemise humide : pourtant, dans les escaliers, il ne pleut pas...

Japonais mitrailleurs...
Interdiction de se relâcher, car la route jusqu'au point de reddition est encore longue et le respect des règles évitera de retrouver son portrait dans certains fichiers.  La police suisse aime les photos, sans doute par analogie aux milliers de touristes japonais qui mitraillent sans relâche leur beau pays !  Avec les quinze minutes nécessaires à la remise en configuration standard de l'engin, lavé, plein fait, c'est dans les délais que je remets à son arsenal mon char du week-end.  Mission accomplie !
Pour le debriefing, je noterai dans mon rapport que dans l'ensemble tout s'est bien déroulé, sauf peut-être les lombaires, raidies par de vieilles blessures de guerre.  La consommation d'eau était certainement importante.  Toutefois, je dirai que le mélange air/essence s'est contenté de huit litres sept aux cents, pied très léger.  En parcours urbain, j'ai relevé 14-18 litres...  Sans passer par les Invalides et étant rasé de près.

Capacité appréciable...
Pour l'huile, les cent mille kilomètres fatidiques à Toyota n'ayant pas encore été franchis, je n'ai pas regardé la jauge et j'espère que les segments laisseront un peu de répit au propriétaire de l'engin.  Même avec l'excuse des conditions météo, je reste un peu pantois face au manque de stabilité du convoi et à l'insonorisation perfectible, surtout lors de projection d'eau ou de gravillons par le dessous : hormis la place, l’ambiance « boîte de sardines » est garantie, malgré la moquette, la surmoquette et le tapis de caoutchouc.
La capacité de chargement est, par contre, appréciable face à la concurrence, hormis certains aéronefs opérationnels au service de la France.  Les portes latérales et le hayon arrière à grande ouverture ont facilité tant l'embarquement que le largage.  Coulissants, les ouvrants arrière ont montré leur attrait, en évitant judicieusement de se refermer ou de s'arracher à chaque coup de vent.  Bien que fort chargé, le Previa dispose d’un freinage correct.  Toutefois, les trajectoires, vu le poids, auraient tendance à s'élargir un peu trop à mon goût en cas de sortie de volets en plein virage sur l'aile, cela malgré les quelques aides électroniques bienvenues.  La physique restera la physique.

Fin de mission !
Relativement agréable à vivre dans ce cas de figure, le Previa ne m'a pourtant pas laissé une très forte impression pour un usage quotidien.  Je le considère comme un véhicule dont il faut absolument avoir l'utilité, notamment par le gabarit ovoïde de dinosaure, une masse déplacée non négligeable que le rendement du moteur n’arrive pas à gommer lors du passage à la pompe.  Comme toute masse a un volume, la visibilité des arrondis de carrosserie se doit d’être préservée par des radars afin d’éviter quelques angles rentrants indésirables.
Le béret vert m’attendait fièrement en compagnie de son copain képi, les trois plis de ma chemise refaits et mon casernement réintégré, j'attends mon prochain décollage.

 

 

(*)
Diane : Batterie de tambour ou sonnerie de clairon ou de trompette qui annonce le réveil des soldats et des marins.

 

 

 

 

Décembre 2007


 


 

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Frank Poisin- Suisse
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